Balade avec les Jardiniers de Maubeuge et de la Vallée de la Sambre
Chronique pour « La Sambre » du 5 décembre 2025 N° 807
Avez-vous déjà entendu parler de Robert Fitzroy ? Cet aristocrate britannique né en 1805 s’est, tout jeune, senti attiré par la mer et la science. Au lieu de pantoufler dans une quelconque fonction proche de la famille royale, il a choisi de s’engager dans la Royal Navy. Il a rapidement gravi les échelons jusqu’à ce qu’en 1831, à 26 ans, on lui confie le commandement du bateau Beagle. Cette embarcation est devenue célèbre car c’est elle qui a transporté Charles Darwin le long des côtes d’Amérique du Sud.
Pendant un périple de cinq années, les deux scientifiques ont scruté les rivages, les volcans, la nature. Charles Darwin a multiplié les observations qui lui ont permis d’élaborer sa théorie de l’évolution. De son côté, Robert Fitzroy se concentrait sur les cartes, les baromètres, les vents, et il inventait une science totalement nouvelle : la météorologie. Très croyant et très attentif au sort des populations, il se disait qu’en prévoyant le temps, les humains auraient la possibilité de se mettre à l’abri des catastrophes et donc de voir leurs vies épargnées.
Pourquoi, me direz-vous, évoquer la vie de ce navigateur du 19ème siècle dans une chronique consacrée à la nature et au jardinage ? C’est que, en reconnaissance des services rendus à l’humanité par Robert Fitzroy, son nom a été donné à un arbre qui est aujourd’hui le plus vieux au monde.
Le fitzroya cupressoides, en latin, est parfois surnommé faux cyprès de Patagonie ou encore mélèze de Patagonie. Originaire du Chili et d’Argentine, il fait partie de la famille des cyprès. Il est remarquable par sa taille, jusqu’à 50 à 60 mètres, et par le diamètre de son tronc, supérieur à 4 mètres. C’est un géant ! Il vit dans les forêts humides, voire marécageuses. Il porte des feuilles écailleuses, réunies par groupes de trois, avec des bords dentés.
Le plus étonnant est sa longévité, qui s’exprime en milliers d’années. Le plus vieux fitzroya connu vit au Chili, dans le Parc national Alesce Costera, au nord de la Patagonie. Il afficherait plus de 5 000 ans…Les autochtones le vénèrent comme un symbole de sagesse et de résilience : on ne peut qu’être d’accord.
Les fitzroyas revêtent une grande importance sur le plan économique. Ils servent à la construction, grâce à la dureté de leur bois. Leur résine est utilisée en substitution de l’encens. Quant à leur écorce, elle est utile pour calfeutrer les bateaux. Malgré toutes ces qualités, le fitzroya est classifié comme essence en voie de disparition, à cause de l’exploitation forestière excessive et du fait des incendies.
Vous pouvez essayer de cultiver un fitzroya chez vous. Encore faut-il que le jardin soit très grand, que le sol soit humide et le climat pluvieux, qu’il ne fasse ni trop froid ni trop chaud : l’arbre se sent mal au-dessus de 30° et en-dessous de -18°. Si vous réussissez, vous aurez la satisfaction d’accueillir chez vous un témoin vivant de l’histoire de notre terre.
Association Les Jardiniers de Maubeuge et de la vallée de la Sambre
Site internet : lesjardiniersdemaubeuge.fr
